jeudi 19 février 2009

A week at Eagles Crossing





Lorsqu'a 09h49, je descendais du bus a Daylesford, je ne savais pas encore ce qui m'attendait. Deux jours plus tot, j'avais parle avec Sam qui, de sa voie posee et rassurante, mavait convaincue de venir chez lui, a Eagles Crossing. Je n'avais lu que brievement son profil dans le Wwoof book mais acceptait tout de meme rapidement.. Je n'avais nul part d'autre ou aller, je ne voulais pas rester a Melbourne et la vingtaine de wwoofers que j'avais d'ores et deja appelle avaient tous repondu par la negative. Le rendez-vous etait donc fixe, lundi matin, 09h49 a la gare routire de Daylesfor. "Tu me reconnaitras" m'avait dit Sam, "je suis age et porte une longue barbe blanche".
En descendant du bus, je ne manquais effectivement pas Sam qui m'attendait dans sa vieille Ford rouge des annees 70. Il m'accueillit avec un large sourire: "Avant de rentrer, nous devons d'abord nous arreter a la source et faire des provisions d'eau pour la semaine !" Le ton etait donne, il n'y avait donc pas d'eau courante a Eagles Crossing.
Nous voila donc a remplir de gros jeriquanes, qu'il preferre remonter lui meme a la voiture, pour que je ne me fasse pas mal au dos. Pendant qu'il remonte la pente, je l'observe, je vais passer la semaine avec lui. Il porte une large chemise en jean sur un pantalon en toile sali par la terre, de grosses boots Caterpilar et surtout un grand chapeau de paille. Ses yeux sont d'un bleu tres clair mais sa peau est abimee; son visage esr tachete et sur une joue, une croute suinte. Il a cette meme croute sur la levre et une autre sur la main gauche. J'apprendrai plus tard que Sam souffre d'un cancer de la peau qu'il soigne avec un onguent fabrique par ses soins a base d'huile d'olive et de petales de calendula.
En route vers Eagles Crossing, les paysages defilent: des arbres majestueux, des champs grilles par le soleil, des vaches noires, assommees par la chaleur. On pourrait trouver le spectacle desolant mais le tout est magnifique, le soleil est la, maitre tout puissant.
Nous quittons finalement les routes goudronnees pour suivre les chemins de terre. Il n'y a plus ame qui vive, rien aux alentours... Nous sommes arrives.
Je regarde avec effroi autour de moi. Je ne connais pas Sam, je ne connais pas la region, j'espere au plus profond de moi que mon telephone a du reseau... Pas de chance, non. Je suis au beau milieu de nul part, seule avec Sam.

Sam ne peut pas etre mechant, il a 63 ans, une grande barbe blanche, les yeux bleus et recoit des wwoofers. S'il y avait eu un quelconque probleme auparavant, il ne serait plus dans le guide. Je me resaisi pendant que Sam me fait faire le tour du proprietaire. "Tu as de la chance, finalement les deux italiennes ne viendront pas, tu pourras donc choisir ta chambre." De la chance ? Cela veut surtout dire que je serai bel et bien seule avec Sam ! Mais voyons donc ces chambres.

J'ai le choix entre une caravane en plein soleil ou bien une mezzanine dans une petite piece amenagee au fond d'un hangar. Va pour la mezzanine, au moins il y fait frais. "Ici, il y a donc les toilettes seches, et la, la douche. Tu peux la prendre froide si tu prends leau de pluie ou bien on peut te la faire chauffer et on la mettra dans ce sac en plastique noire." D'accord... Meme pas peur ! J'ai deja vecu ca au Canada, tout pareil sauf que c'etait dans la foret !

Nous descendons ensuite la route pour arriver a sa maison a lui. Une sorte de retraire pour hermite, cachee au milieu des arbres. Pas d'eau, pas d'electricite, pas d'internet evidemmet, pas ou tres peu de reseau... la semaine s'annoncait longue. "Mais pourquoi est-ce que je suis ici deja ?" Je ne sais plus bien...

Au fil des journees, jai tout de meme compris la raison de ma visite. Certes, je ne beneficiais d'aucun confort mais tout ce que j'aurais vu et appris pendant cette semaine valait ce sacrifice.
Nos journees commencaient par le petit dejeuner. Infusion de sauge, menthe, millefeuille, romarin et autres petales de fleurs... (Pour les non inities, je deteste le the et le matin je ne bois que du lait au chocolat !) accompagnee de muesli, amande, abricots et raisins secs, graines de tournesols ... (dhabitude je mange des crepes au nutela). Le tout dans la "little hous"e de Sam a 08h30. L'ambiance y est rustique: un vieux poele, une vieille armoire remplie de bocaux plein d'herbes sechees, des instruments de musique, de vieux objets... Apres s'etre rassasies, nous allons au jardin. Il faut y arroser les fruits et legumes que nous mangerons plus tard. L'eau est pompee a meme un plan d'eau qui s'aseche de jour en jour. Cela fait des mois qu'il n'a pas plu une seule goute d'eau. J'apprends a reconnaitre les tomates, les brocolis, la sauge, le romarin, les melons, la rubarbe, les choux de bruxellesm la wheat grass, les trefles... J'arose, je beche, je plante, je desherbe, je ceuille des fleurs...

A 11h30 vient l'heure du "green shot". Nooonn, pitie, pas le green shot ! "Si, si, c'est tres bon pour la sante !" D'accord... Nous coupons donc l'herbe dans le potager et allumons grace a un generateur le mixeur. Je brois l'herbe et en sort un jus vert epais, visqueu e tiede. Green shot ! Berk... Mais il parrait que c'est bon pour ce que l'on a ! Comme recompense, nous avons ensuite droit de presser des pommes, carottes, celeri, betterave. Apres un green shot, le jus me parrait delicieux.

Sam parle beaucoup, me montre beaucoup de choses egalement et les journees filent a la vitesse grand V. Le midi, nous nous concoctons une "delicieuse" salade a base de feuilles des plantes du potager. Tres, tres tendre... ! Mais ca aussi, a ce qu'il parrait, c'est bon pour ce que l'on a. Lorsque cela ne suffit pas, nous faisons bouillir de la soupe sur un feu et mangeons un peu de pain avec du beurre stocke dans le "frigo". Le frigo consiste en une boite metalique posee sur le sol en beton a l'interier du hangar.

L'apres-midi, nous allons nous baigner dans l'etang aux nenuphares. Le sol est completement vaseux, l'eau maronasse mais il fait tellement chaud que j'y plonge tout de meme avec plaisir. Et le parfum des nenuphars vaut le detour. Mais, ce qui m'interesse surtout au bord de cet etang, c'est qu'il y en a un autre plus petit, juste a cote, auquel viennent s'abreuver les kangourous ! Ils me fascinent, je les ai observe pendant longtemps. Pour faire la cour a une demoiselle, le kangourou male vient gratter la queue d'une femelle. Celle-ci accepte ou refuse les avances du male par un mouvement de la tete. Quand un petit est trop grand pour etre encore dans la poche ventrale de sa mere mais qu'il s'alimente encore de son lait alors il met la tete dans la poche et tete. Pour se deplacer rapidement, ils sautent, le bruit qu'ils font en retombant est sourd et sec. Mais ils peuvent egalement marcher a 4 pattes, lorsque par exemple ils approchent doucement d'un etang. Leurs oreilles tournent a 360 degres, ce qui leur permet de gueter toute menace eventuellement sans avoir a bouger.

Au bord de cet etang, j'ai aussi le plaisir d'admirer des renards, des serpents, des perroquets aux couleurs vives... C'est un monde enchante que nous ne soupconnons pas lorsque nous sommes en ville. Un monde ou Sam vit seul.

Je lui tiens donc compagnie et l'ecoute me raconter ses histoires. Il faut etre patient, il en a tant qu'il ne s'arrete jamais. Il parle, parle et parle encore mais l'ecouter me demande une reelle concentration, alors parfois je decroche. Son anglais est un anglais d'australien: il articule peu, parle avec le nez et utilise des mots inconnus. Par exemple, tucker (prononce taca) veut dire food. Pourtantm il n'est pas australien, il est suisse. Il est arrive en Australie il y a maintenant 40 ans. L'ete dernier il est rentre dans son pays, cela faisait 39 ans qu'il n'avai pas vu sa famille. 39 ans... En Australie, il s'est marie, a eu deux enfants. Il a d'abord travaille dans les ordinateurs puis, il a ete chaufeur de taxi et finalement deratiseur. Sa femme l'a quitte. "Apres 27 ans de mariage..." Ses enfants etaient deja grands alors il est venu s'installe a Eagles Crossing, afin de vivre en comunion avec la nature et oublier cette vie qu'il avait construite et qui n'etait desormais plus la sienne.

Le monde d'aujourd'hui n'a plus aucun sens pour lui et il ne comprend pas les jeunes. Sa vie consiste en se nourrir, se baigner (et manger des roseaux), parler aux animaux, prendre soin de ses plantes et recommencer ainsi, tous les jours.

"Chaque jour est un cadeau dit-il." Car en plus du cancer qui lui troue la peau, il souffre d'une thrombose des veines profondes. Sa cheville gauche est 3 foi plus epaisse que celle de droite et sur le molet se dessine une grosse tache rouge violasse et grumeleuse d'une dizaine de centimetres de diametre. Ppur ne pas arranger les choses, il a egalement de l'eau dans les genoux ! Il touche donc une pension du gouvernement, pour infirmite. Pour arrondir ses fins de mois, il vend des pommes et le meme the que celui qu'il me fait boire le matin.

Le soir, a la nuit tombee et a la lueur d'une bougie, il aime jouer du didjerydo. Il pratique egalement le yoga et maitrise lart du shiatsu. Sam est aussi tres spirituel, il croit en la reincarnation. Il dit que dans ses vies anterieures, il devait etre femelle. C'est pour cela qu'aujourd'hui il est si sensible et si attentif aux choses de la vie. Peut-etre a-t-il raison... Mon esprit terre a terre ne me permet pas de partager tous ses points de vue mais ma curiosite me pousse a lecouter et a apprendre sur cette "culture" qui n'est pas la mienne.

La nuit tombee, nous regardons les etoiles et il me ramene a la "big house". Je monte dans ma mezzanine, me glisse dans mon sac de couchage apres avoir verifie qu'aucun insecte monstrueux n'y vait elu domicile et enfile mes boules quies. Je n'ai pas ose avouer a Sam que le bruit des souris et du vieux renard me terrorisait lorsqu'ils venaient piocher dans les pommes de terre stockees juste sous ma mezzanine, et que je ne preferrai ne pas les entendre...


Avec une journee de recul, je me rends compte que pour cette premiere semaine australienne je me suis fixee la barre un peu haute (mais sans le vouloir !). Je me dis que compare a ca, desomais tout va me parraitre facile, et c'est tant mieux car le meilleur est a venir.


Je viens de retrouver Louis et nous partons ce soir, en bateau pour la Tasmanie.


(Pour se faire une meilleure idee de ce que j'ai vecu, vous pouvez regarder les photos sur Facebook)

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